Avec un article du P. Paolo : « Soyons tous cardinaux »
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Chers amis, à la fin de cette année 2005, vraiment pas banale à tous points de vue, la Communauté monastique de Al-Khalil (l’Ami de Dieu) voudrait de tout cœur vous souhaiter une sereine et bonne fête de Noël, et une année 2006 dont nous puissions tous nous souvenir longtemps comme d’une bonne année. Nous venons de célébrer avec nos amis Musulmans la fête de la fin du jeûne du mois de Ramadan, et probablement cette lettre vous rejoindra à temps pour souhaiter à tous une bonne fête du Sacrifice d’Abraham (la fête musulmane de l’Adha) au moment du grand pèlerinage à la Mecque.
L’année qui est en train de s’écouler ne nous a presque rien épargné. L’humanité, qui a souffert de plusieurs catastrophes «naturelles», s’est payée plusieurs conflits plus ou moins sanglants. Pour notre région du Proche Orient, nous sommes toujours affligés par la guerre en Iraq, notre voisin de l’Est, ainsi que par celle, interminable, de Palestine-Israël. Vous trouverez un essai d'analyse de la situation socio-politique de la region plus loin dans cette lettre.
Au niveau de la vie de notre Communauté monastique, il faut noter plusieurs choses.
Les Constitutions de la Communauté attendent à Rome l’approbation du Saint-Siège après un premier tour d’observations et de réponses. Ce dossier, de fait, ne fait qu’un avec celui de la discussion théologique en cours sur les idées du P. Paolo à propos de la relation islamo-chrétienne. Les grands changements romains du printemps 2005 ont retardé les choses mais nous avons l’immense avantage que le nouveau pape soit personnellement au courant de nos questions. Nous demandons les prières de tous nos amis pour que notre chemin d’Eglise s’approfondisse en engagement et clarté. Le cas pourrait se présenter d’avoir besoin de vos témoignages, surtout en tant que croyants, par rapport au rôle que notre Communauté a pu jouer dans votre itinéraire de foi, dans le monde d’aujourd’hui. En effet nous en sommes à une étape cruciale du discernement qui mènera, avec l’aide de Dieu, à un établissement consolidé de notre Communauté.
La béatification, le 13 novembre, à Rome, du Père Charles de Foucault a été pour nous un signe important car nous le considérons comme une des sources de notre identité spirituelle. De fait, Louis Massignon, le grand chercheur dans le domaine de la mystique musulmane, est reconnu comme l’héritier le plus direct du Frère Charles de Jésus et il est pour nous un vrai maître et inspirateur. Pour la béatification, nos Frères Jacques et Boutros ont fait l’aller-retour à Rome où ils ont rejoint le groupe de nos étudiants en théologie, à l’Université Grégorienne, Jens, Houda et Jihad. En même temps, ici à Deir Mar Musa, un bon nombre d’amis, et parmi eux deux Petits Frères de Jésus (congrégation directement inspirée par la spiritualité foucaldienne), se sont rassemblés pour prier à cette occasion… Nous avons ainsi inauguré l’antenne satellitaire pour suivre en direct la cérémonie sur le grand écran de la nouvelle salle de Deir el-Hayek. La semaine suivante, c'était les Petites Soeurs de Jésus qui rassemblaient tout le monde à Seydnaya, pas loin de Damas pour une veillée de célébration. Notre communauté était très bien représentée et nous avons tous senti que le Frère Charles s’occupe efficacement de nous.
Un jeune paysan, Youssef, de 31 ans, du village araméen de Maaloula pas loin de nous est là depuis six mois comme postulant. Dernièrement nous avons reçu deux autres postulants : Rita, montagnarde syrienne de 25 ans, grecque orthodoxe et Daniel qui vient de terminer son service militaire, un maronite de 23 ans qui souhaitait rentrer dans la communauté depuis plusieurs années.
D’autres personnes, de partout dans le monde, s’intéressent à notre vie sérieusement. Priez pour nous tous.
Notre Frédéric a quitté le noviciat après trois années à Deir Mar Musa. On ne peut que le remercier pour tout ce qu’il a généreusement fait pour notre mission commune (ce n’est pas seulement les abeilles), et nous souhaitons rester de très bons amis et peut-être collaborer intensivement avec la famille que, semble-t-il, il fondera bientôt avec notre amie Stéphanie, une chercheuse américaine dans la relation islamo-chrétienne, qui elle aussi n’était pas indifférente aux charmes de Deir Mar Musa.
Tim, un anglais de 40 ans, docteur en sociologie, a passé 9 mois dans une grotte, renouvelant la tradition des ermites. Il descendait le dimanche pour célébrer la messe, passer la journée avec nous et faire des provisions. Il en est sorti pour Noël, et repart le 29 décembre pour l’Angleterre. Nous lui sommes reconnaissants pour son témoignage à la valeur spirituelle de la solitude et de l’efficacité de la prière d’intercession.
Une américaine, dans sa trentaine voudrait prendre la relève, on verra bien !
Izmi, musicienne japonaise, après quelque semaines passées ici est repartie voir sa famille, mais on sent son violon dans l’église.
Quatre francophones viennent de terminer le mois ignacien d’Exercices Spirituels : Raphaël, 24 ans a reçu le baptême la nuit de Noël ; Diane continue son chemin de volontaire ; Raymond profite bien lui aussi de l’ermitage au sommet de la montagne où il aide beaucoup dans les travaux agricoles et Tiphaine partage la vie de la communauté pour six mois avant de poursuivre sa route vers l’Inde.
Notre amie Guyonne, qui, il y a trois ans avait vécu son mois d’Exercices, a passé tout le mois de juin à enregistrer des entretiens avec le Père Paolo autant sur son histoire personnelle que sur celle de la Communauté et sur les idées maîtresses de notre engagement. Cela est devenu un livre que nous avons retravaille ensemble début octobre et qui sortira chez Albin Michel – Paris, en mars… Bonne lecture !
Le séjour de la famille de Claude, Mathilde et Iona à Qaryatayn s’est terminé. N’empêche que nous considérons positive cette expérience de proximité d’une famille avec notre Communauté. Cela nous pousse à réfléchir davantage sur le rôle et les voies de collaboration entre vie monastique et vie laïque engagées sur les mêmes priorités.
Dans le cours de l’année 2006 se terminera l’heureuse collaboration avec les volontaires Diane (agriculture, environnement et développement durable) et Eglantine (bibliothèque et secrétariat international). Cette expérience de deux ans s’est révélée bien positive et nous espérons avoir d’autres candidats pour prendre la relève. En ce moment dans lequel, la plupart de la Communauté se trouve dans les études, la présence de volontaires et des employés laïcs locaux est littéralement irremplaçable. Il faut ajouter que cela nous fait grandir dans le désir et la conscience de vouloir nous associer comme religieux et comme laïcs dans une relation de partenariat centré sur des buts communs.
Le 30 août est né Abdou, le fils de Mehyar, notre informaticien. Et c’est avec joie qu’il a ainsi pris le nom de Abou Abdou.
La question de la distribution de nos forces est pour nous brûlante car d’un côté, le développement du flux des visites à Deir Mar Musa, qui risque de devenir exponentiel, pose une question majeure en terme d’accueil et d’accompagnement. D’un autre côté, nous ne renonçons pas à prévoir d’autres installations dans d’autres pays du Monde de l’Islam. Fr. Jens sera en Iran au mois de juillet pour commencer à apprendre la langue. Père Paolo rêve d’une année sabbatique et de se mettre lui aussi au persan.
A Qaryatayn, le travail d’excavation archéologique s’est un peu enlisé et nous espérons reprendre avec enthousiasme l’été prochain. Entre temps, nous avons pu réaliser l’essentiel de l’aile est du nouveau bâtiment. Ca a l’air très bien et il s’harmonise avec la partie la plus ancienne. En septembre 2005, nous avons commencé à rebâtir l’église de 1932, que nous avions démontée auparavant dans le cadre de la campagne archéologique de 2004. Les pierres numérotées retrouvent leur place. Marwan Kassis qui s’en occupe a déjà pas mal d’expérience acquise à Deir Mar Musa.
Au point de vue agricole, il y a eu des expériences dans les plantes médicales et aromatiques. C’est le point vente de Deir Mar Musa qui devrait écouler la production… Pour les olives aussi, cela va de mieux en mieux. Le Père Jacques trouve qu’on n’a pas encore fait assez pour favoriser le développement économique durable de la ville. Une importante organisation gouvernementale de lutte contre la désertification collabore avec la paroisse pour des expériences dans le domaine des pâturages sur les vastes terrains de Deir Mar Elian.
L’évolution des choses nous fait imaginer qu’à long terme Deir Mar Elian pourra avoir un rôle, par rapport à la vie monastique, même plus incisif que Deir Mar Musa où le service apostolique d’accueil est très exigeant. Sans savoir où cela aboutira, dès maintenant notre responsabilité à Deir Mar Elian grandit et le dialogue avec notre Evêque, Mons. Georges Kassab, se développe dans ce sens.
Dans l’ancien bâtiment de Deir Mar Musa, nous venons de terminer l’essentiel de la construction de la nouvelle salle de lecture de la bibliothèque avec accès interne aux rayonnages. Les rayons restent à faire. On ne peut que remercier ici la Fondazione Giorgio Orseri ainsi que l’Œuvre d’Orient pour l’aide accordée. L’Institut Français des Etudes Arabes à Damas est aussi à remercier pour l’offre de ses prestigieuses publications.
Une bibliothèque aujourd’hui est une institution en crise. L’informatique fait que l’importance du livre en tant qu’objet papier n’est plus ce qu’elle était. Les avis sur le futur sont très partagés là-dessus. Sommes-nous la dernière génération à avoir encore besoin du papier ? De fait nous imprimons nos courriels pour les lire aisément mais les plus jeunes ne le font pas. J’en discute avec Eglantine, notre volontaire française bibliothécaire. En effet, avoir des documents pertinents avec nos priorités et rangés d’une façon qu’ils soient faciles à trouver, facilite énormément la recherche et la consultation. De plus, une société où chacun a son ordinateur portable toujours sur soi (où certains pensent même se le faire greffer comme un organe en plus) et en étant connecté au réseau nuit et jour, ne semble pas être pour demain matin ni pour tout le monde. Il est vrai que le bouquin devient tout de même de plus en plus un objet affectif, un symbole, quelque fois une œuvre d’art, un moyen de contact avec quelqu’un et son monde. Dans ce sens, quand vous avez un livre dont vous pensez qu’il aurait quelque chose à nous dire, signalez-le nous ou encore mieux amenez-le à votre prochaine visite. Plusieurs ont déjà fait cela et ainsi la bibliothèque devient, entre autre, une mémoire de l’amitié et un vaste et multiforme champ, autant sémantique que relationnel, est en train de s’y réaliser. Cela ne nous empêche pas de développer la dimension informatique et, une fois que l’on aura plus de lignes téléphoniques, la recherche sur le réseau se jumellera à celle sur les rayons.
Le grand projet du nouveau monastère de el-Hayek se développe lentement car notre équipe de travail s’est trouvé engagée sur plusieurs fronts.
A la suite de la déclaration du Parc on a dû déplacer notre troupeau vers une nouvelle bergerie à l’emplacement du vieux garage à deux kilomètres à l’ouest du monastère, pas loin de l’ermitage. Un deuxième étage a été ajouté au garage, avec un enclos qui a glorieusement reçu la très vieux et beau portail en fer forgé du couvent des jésuites de Homs. Nous avons acheté quelques chèvres d’une race plus laitière au Mont Hermon et nous espérons améliorer la production fromagère.
A la suite de la déclaration du Parc on a dû déplacer notre troupeau vers une nouvelle bergerie à l’emplacement du vieux garage à deux kilomètres à l’ouest du monastère, pas loin de l’ermitage. Un deuxième étage a été ajouté au garage, avec un enclos qui a glorieusement reçu la très vieux et beau portail en fer forgé du couvent des jésuites de Homs. Nous avons acheté quelques chèvres d’une race plus laitière au Mont Hermon et nous espérons améliorer la production fromagère.
Tandis qu’au-dessus du nouveau garage à l’est du monastère, à côté du parking, une boutique est en train d’être aménagée et elle va avoir aussi un rôle de premier accueil des visiteurs surtout dans les périodes d’afflux touristique.
Pour Deir El-Hayek, on en est à l’étage de l’ancienne grotte de l’ermite qui sera la chapelle du monastère. Il y a une vaste terrasse avec un très beau patio qui fera la joie des contemplatifs car il a une vue magnifique sur la vallée. Pratiquement toutes les chambres, une dizaine, que nous avons bâties sont déjà occupées presque en permanence. C’est surtout au niveau des chambres individuelles qu’il faut développer le projet, une fois que la cuisine et la salle seront carrelées. Notre programme est que dans cette maison, en plus de la place pour les membres permanents féminins de la Communauté monastique, il y ait l’espace adéquat pour des activités spirituelles comme les retraites, des cours bibliques ou théologiques et des séminaires de dialogue plus approfondis et ciblés.
A Cori, résidence de nos étudiants au sud de Rome, la grande nouveauté est que Sr Houda a déménagé dans la maison annexe à l’église de San Salvatore. Un merci cordial est à exprimer à monsieur le curé Don Ottaviano et à toute sa communauté paroissiale qui nous ont adoptés avec un esprit évangélique remarquable. Plusieurs voisins de Cori nous ont rendu visite en Syrie et notre amitié grandit. Notre espérance est que l’Istituto Centrale del Restauro de Rome puisse installer un chantier didactique dans l’église de San Salvatore pour réaliser la restauration de l’intérieur et des décorations. Entre temps on aménage la maison petit à petit et Sr Houda est très heureuse de pouvoir recevoir des amies chez elle.
En février, la novice Dima la rejoindra pour l’étude de la langue jusqu’à l’été. Après ses vœux, Inch’Allah, en septembre à Deir Mar Musa elle commencera le cursus à la Grégorienne. Sa dernière année de noviciat a été bien remplie, avec un voyage pèlerinage à la découverte d’autres dimensions du Monde musulman et de l’Eglise de l’Islam (l’expression n’est pas mienne mais bien du Patriarche Melchite Grégoire Laham au dernier synode des Evêques à Rome) en compagnie d’Eglantine en Iran et en Turquie. A Damas, elle a passé un mois dans la Communauté de l’Arche consacrée aux personnes porteuses de handicaps mentaux et son service a été bien apprécié. Fr. Jihad a quitté la Syrie pour Rome à la fin de l’été avec une certaine préoccupation car son papa sortait d’une importante opération chirurgicale. Il est fils unique et cela ne simplifie pas les choses. Grâce à Dieu et à son oncle, la situation s’arrange et il peut se dédier plus sereinement à la préparation de ses examens.
Par rapport à l’Iraq, nous partageons l’angoisse d’un grand nombre de réfugiés qui cherchent en Syrie un peu de sécurité surtout pour leurs enfants. Les réfugiés chrétiens sont même, en pourcentage, plus nombreux que les autres, car le pays semble aller vers un confessionnalisme accru et une fragmentation dans laquelle ils trouvent difficilement leur place et un espace de vie; ils sont donc tentés de rejoindre leurs parents et voisins qui les ont déjà précédés dans une émigration aux quatre coins du monde. Cela n’est pas toujours facile car l’Occident est obsédé, non sans raisons, par la phobie de l’invasion et de la perte d’identité ainsi que par l’insécurité et le chômage.
Il n’y a pas que des mauvaises nouvelles. Le processus démocratique iraquien semble, malgré tout, entamé et d’une façon assez dynamique en fin de compte. Ce qui risque de tout gâcher, c’est de part et d’autre la logique d’un affrontement sans merci entre civilisations et un jeu pervers dans lequel chacun veut profiter du grand moment du changement pour déplacer ses pions aussi loin que possible, non dans une logique de justice mais dans une logique de profit.
Certes, il y a de grands événements nouveaux. Le Chiisme arabe trouve dans la crise iraquienne une énorme occasion d’auto affirmation et de promotion. Le risque de guerre civile est très réel et déjà actuel. Pour le moment ce sont les forces américaines qui, paradoxalement, évitent l’enfer généralisé. Mais en un sens, elles le préparent aussi. Il est intéressant de noter que la question qui se posait à la collectivité internationale depuis les années 90, face au régime génocidaire et tortionnaire iraquien, reste entière aujourd’hui.
C’est la collectivité internationale qui doit porter la responsabilité de libérer les peuples des régimes liberticides et avec la participation active et inventive des peuples intéressés. Ce n’est pas à l’hyperpuissance de le faire car cela génère une situation dans laquelle la résistance devient une nécessité et un devoir historique car, tout en remerciant Dieu de nous avoir libérés de Saddam par le biais des américains, on doit assumer la responsabilité de limiter les dégâts provoqués par les irrépressibles appétits impérialistes. (Il y a certainement un immense problème du choix des moyens de résistance qui peuvent aller d’une non-violence tout à fait politique jusqu’à la stratégie suicidaire la plus affreuse). Reste que l’évolution du chiisme iraquien est d’une très grande importance car elle peut déterminer aussi celle du Hezbollah libanais (et de toute la société chiite libanaise) ainsi que l’évolution de la République Islamique Iranienne en offrant un autre modèle.
Pour cela il faudra commencer (mais qui…, les diplomates, les politiques, les gens de bonne volonté ?) à favoriser une évolution du sunnisme iraquien autre que la dérive actuelle. Il faudra aussi récupérer, face au fractionnement communautariste, le discours national arabe, élément fondamental d’unité du pays, surtout si relié à une identité musulmane de civilisation et d’allure oecuménique.
Les Kurdes évidemment voient leurs rêves se réaliser, au risque d’imaginer de pouvoir faire la même chose en Turquie, en Syrie et en Iran. Il n’est pas facile de demander à un peuple de renoncer à se réaliser en nation, mais n’y aurait-il pas une voie autre que celle du sang et de la séparation ethnique pour y parvenir ?
La collectivité internationale a tendance à refuser au nom du statu quo, les projets de déstabilisation et chambardement de toute une région. Ils sont nombreux à penser que l’acquisition des droits du peuple kurde, peut se faire dans une logique fédérale à l’intérieur des quatre pays intéressés. Ce qui n’empêchera pas par la suite une forte interaction entre les quatre régions à majorité kurde. Un tel projet a l’énorme avantage de ne pas pousser, face à la revendication nationale, les différentes sociétés intéressées à se dresser violemment contre la revendication kurde jusqu’à la limite de l’attitude génocidaire, comme cela a été le cas en Turquie et dans l’Irak de Saddam.
L’entrée de la Turquie en Europe, l’accord d’association euro-syrien, une pacification de l’Irak dans un cadre fédéral, accompagné comme par ricochet par une évolution pluraliste de la société iranienne (et là, pour le moment, nous sommes au niveau des rêves et des souhaits), pourraient enfin offrir le cadre de résolutions durables et positives de cette question kurde. Evidemment, il peut y avoir des tentations atlantiques de créer un grand Kurdistan philo-occidental pour interrompre l’axe asiatique panturc. Mais cela se ferait dans un immense bain de sang et ce n’est pas acquis du tout que ce Kurdistan resterait philo-occidental… De plus, on risque une reprise du nationalisme turc mais cette fois dans une attitude anti-occidentale et probablement islamiste radicale.
La situation libanaise a évolué très vite depuis la sortie de l’armée syrienne de son territoire. Vu d’ici, le Liban semble s’éloigner. La contiguïté géographique et culturelle est tout de même telle que nos destins restent tout à fait liés. Les stratégies de cantonnement des pays de la région, certainement favorables au programme sioniste, ne pourraient se réaliser que dans une balkanisation chronique et une stérilisation culturelle de l’arabité en définitive empoisonnantes. Les chrétiens arabes y perdraient presque tout, à l’exception peut-être d’un canton maronite. En disant cela, je ne voudrais pas pour autant m’opposer à tout projet fédéral. Une fois les appartenances communautaires particularistes reconnues et d’une façon ou d’une autre épanouies, il est plus facile de retrouver les voix d’expression d’unité de civilisation plus larges. Cela vaut pour le Liban et d’une façon différente même pour la Syrie et encore plus clairement pour toute la région. Là aussi, il est opportun de continuer à observer l’évolution du chiisme libanais et tout particulièrement du mouvement du Hezbollah que j’imagine tiraillé entre un projet d’enclave chiite sud-libanais particulariste d’un côté ou bien d’un projet d’hégémonie chiite sur le Liban dans son ensemble comme étape et cas particulier d’une ère chiite pour la région moyen-orientale.
La situation en Palestine-Israël nous affecte, comme depuis toujours. La Palestine, imaginée par Monsieur Sharon et peut-être envisagée par l’administration des Etats-Unis, et combattue par les franges les plus radicales du mouvement sioniste (clairement tentées de poursuivre un projet de nettoyage ethnique par le biais d’une déportation massive des populations palestiniennes au-delà du Jourdain), est tellement invivable qu’elle montre d’elle-même ne pas constituer une solution durable. Il n’y a tout de même pas de solution alternative à court terme. C’est pour cela aussi que même les groupes palestiniens les plus radicaux (qui poursuivent toujours le projet d’éradication de l’Etat d’Israël) se sont rendus disponibles à des projets de trêve, bien que très fragiles.
Nous sommes tout le temps entre des espérances éphémères et la tentation du cynisme face à des projets si radicalement, et de façons spéculaires, opposés et inconjugables. Je garde l’espérance un jour de voir tomber le mur de Sharon, comme j’ai vu tomber celui de Berlin.
Entre temps, il faut œuvrer pour que les bantoustans palestiniens soient le plus ouvert possible et que les populations arabes d’Israël puissent garder, en dépit du mur, le plus de liaisons possibles avec le reste de leur Nation.
En même temps, il faut tout mettre en œuvre pour aider la population juive d’Israël-Palestine à se désenclaver culturellement et pour qu’on puisse en revenir graduellement (d’ici disons cinquante à cent ans) à concevoir un Etat binational sur tout le territoire de Palestine – Israël conjugué avec d’autres appartenances plus larges : Communauté Européenne élargie, Communauté de la Nation Arabe, Communauté des Etats de la Méditerranée…
Le temps, espérons-le avec le moins de sang versé possible, devrait (mais rien n’est là automatique et tout développement positif demande un capital de générosité, de fidélité et d’imagination énorme) rendre possible une évolution culturelle et dogmatique des différents acteurs (Islam, arabité, sionisme, judaïsme, mais aussi laïcité occidentale et position des différentes Eglises par rapport à la Terre Sainte) afin qu’ils puissent penser autre chose que l’impasse actuelle… là est la condition pour passer de la trêve à la paix.
La relation entre Syrie et Israël n’est pas étrangère à la susdite évolution. Aucun traité de paix aujourd’hui entre les deux pays ne garantit l’avenir, à moins qu’il ne s’accompagne d’une forte progression de l’intégration culturelle pluraliste et dialogale dans la région. Cela sera aussi le travail des théologiens et d’une façon transversale aux appartenances religieuses.
Revenons tout de même à parler un peu de la Syrie et de son évolution assez critique en ce moment. Nous pensons avec une majorité de Syriens qu’il faut éviter à tout prix le bain de sang à l’irakienne. Un consensus fait confiance à la présidence actuelle du pays, celle du docteur Bachar el-Assad soutenu par sa femme qui est sensible, juste et sincère. De plus, les Syriens ne veulent pas renoncer à leur dignité nationale arabe et au rôle qu’ils croient devoir jouer dans la région dans un cadre qui reste celui d’un contentieux anti-impérialiste. Enfin, les syriens espèrent obtenir pacifiquement et graduellement la réforme du système et du régime pour accéder à une démocratie mûre.
La pire des choses serait, à la libyenne, de perdre son autonomie nationale et son rôle régional sans gagner la démocratie.
L’évolution positive de la Syrie ne peut se faire qu’en investissant de la confiance dans l’efficacité d’un large dialogue avec les différents courants musulmans sans exclusion, ni discrimination entre prétendus modérés et les supposés fondamentalistes.
La question n’est pas de savoir s’il faut renoncer ou non à pratiquer la résistance et l’opposition ; car, sans la résistance, on devient vite vassal des grandes compagnies pétrolières, des appétits stratégiques et des visées expansionnistes. Et, sans opposition, le pays reste otage d’intérêts familiaux et de la féodalisation bureaucratique corrompue plus ou moins maquillée idéologiquement.
La vraie question est de choisir par quel genre de résistance et quels moyens d’opposition on peut espérer passer le gué sans se noyer. Le premier moyen est de travailler à la création du consensus sans exclusion. Le choix d’une non-violence transparente et vigoureuse est reconnu comme le seul efficace par beaucoup. Cela se fait en dialogue avec les démocrates du monde entier et avec ce qui peut rester de sentiments socialistes internationalistes mais aussi de ce qui resurgit d’humanismes religieux universalistes.
Ici à Deir Mar Musa nous proposons un séminaire d’étude d’un projet du parc régional écologique et culturel du Golan et de l’Hermon à réaliser ensemble avec les jordaniens et les libanais, mais qui, mis en œuvre disons sur le champ pour le côté arabe ne sera achevé que dans le cadre de la paix avec les israéliens et avec la participation des palestiniens.
Il s’agit de se doter d’une arme culturelle et de mass média efficaces pour faire baisser la fièvre de l’inimitié envers la Syrie, aussi bien en Israël qu’en Occident. Il s’agit de favoriser par ailleurs, une culture de la paix ici en Syrie et de travailler aux concepts nécessaires à la négociation d’un accord stable. Le slogan : Les frontières espace de la rencontre et non d’affrontement.
Par ailleurs, et dans la même ligne, avance le projet du Chemin d’Abraham à partir de Urfa et Harran en Haute Mésopotamie turque et tout le long de la Syrie (l’Euphrate, Alep, Hama, Deir Mar Musa, Damas) et à travers la Jordanie jusqu’à Jérusalem et Hébron-Khalil en Terre Sainte (www.abrahampath.org). Dans ce cadre est annoncé et attendu le passage à Deir Mar Musa dans les prochaines années (disons graduellement à partir de 2008) de centaines de milliers de visiteurs par an… Cela demande un énorme effort de prévision et d’organisation lié à un approfondissement de notre théologie de l’hospitalité.
Les pèlerins seront de tradition juive, chrétienne et musulmane mais aussi d’autres traditions et spiritualités, du vaste panorama de mouvements transversaux d’aujourd’hui.
On comprend donc mieux le pourquoi du grand projet de parc dans la vallée du Monastère. La chose est lancée et la société locale est très impliquée. La Commission Ministérielle du Parc (dont Deir Mar Musa est membre) prévoit déjà la réalisation en aval du Monastère, à environ cinq cents mètres de distance vers l’est, d’un large Visitor’s Centre, avec un musée environnemental et culturel (des amis archéologues canadiens s’en occupent, Inch’Allah, avec succès), une hôtellerie, une structure pour des rencontres, des séminaires, des ateliers d’artisanat, le tout dans un jardin axé sur les productions agricoles traditionnelles de notre région, bien sûr, ce sera du bio (olivier, raisin, pistachier, amandier, figuier…)
Il est important d'éclaircir le fait que le Parc de la vallée de Deir Mar Musa n'est pas la propriété du Monastère.
C'est la propriété de la société locale et de l'Etat syrien avec lesquels le Monastère collabore en tant que partenaire principal.
Il est très intéressant de noter que la Commission Ministérielle du Parc a tendance à donner la responsabilité de la direction de l'activité d'accueil à la Communauté monastique avec ses collaborateurs. Cela dit reste le fait que le centre principal d'accueil est et restera un espace public qui appartient à tout le monde.
Il en découle, à notre avis, que cet espace doit s'organiser autour de valeurs culturelles partagées (et il est connu que, dans notre société locale, le culturel est fortement caractérisé religieusement) ce qui n'empêche nullement que cela se fasse dans une large dynamique de dialogue qui reconnaît au Monastère, à l'Eglise locale et à la population chrétienne dans son ensemble, son rôle, sa spécificité, sa capacité d'interaction positive et constructive avec l'entourage largement musulman.
Plusieurs de nos voisins et de nos visiteurs nous ont signifié leurs désirs d'avoir un lieu de prière musulman dans le cadre de cette réalité sociale qu'est le Parc. Cela, disons le clairement, pourrait très facilement se réaliser sur des terrains privés, relativement proche du monastère, à l'entrée même du Parc, sans aucune consultation de la Communauté monastique et sans aucune préoccupation de ménager les sentiments des chrétiens. Cela se passe aujourd'hui, pour des dizaines de cas, dans les quartiers chrétiens de nos villes et nos villages et pas nécessairement à la satisfaction de nos ouailles.
Depuis des années, nous réfléchissons là-dessus. Cela n’a pas été toujours facile car il s’agit de symboles forts qui génèrent des réactions et des sentiments qui le sont aussi. Une solution à cette problématique serait celle de vouloir développer plutôt des espaces laïcs et sans connotation d’appartenances religieuses… Mais pour un Monastère, cela est difficile : c’est un espace sacré pour tout le monde et il pose immédiatement la question de l’identité religieuse. En Syrie pour la plupart des gens cette question ne se pose pas d’une façon polémique mais, Dieu merci et bien au contraire, d’une façon pluraliste et d’intégration fonctionnelle réciproque, en un mot, dialogal.
C’est de là que vient notre rêve des rêves : nous avons tissé localement des contacts pour réaliser un espace sacré qui soit le cœur symbolique du ''Parc environemental, culturel et religieux de la vallee de Deir Mar Musa''. Il s’agit d’un jardin, plus beau et soigné que les autres avec de l’eau au milieu. Dans cet espace seront érigées une église et une mosquée: deux bâtiments distincts mais pas distants, reliés par un patio oasis avec une fontaine, un seul projet architectural et une seule école décorative, fruit d’un dialogue en profondeur d’artiste syriens et autres et de théologiens avec des historiens de l’art de cette région. On veut du simple, des matériaux de la montagne, du travail fait par les ouvriers et les artisans locaux, et en même temps, nous cherchons du très bien fait et soigné, quelque chose qui puisse durer, en témoignage de l’effort spirituel de notre époque. Pour cela on souhaite aussi des bonnes idées de partout dans le monde, car la culture en vase clos n’existe plus.
Ce monument religieux serait dédié à l’hospitalité d’Abraham. Nous imaginons dés maintenant que le même art mosaïque pourrait dans l’église exprimer iconographiquement, ensemble avec les mystères centraux de la foi chrétienne, l’histoire d’Abraham, par une sensibilité fortement orientée vers la culture arabo-chrétienne, en dialogue avec l’environnement musulman. Ce double monument exprimera aussi dans la mosquée, par les couleurs, les formes et les lettres, avec les mystères centraux de la foi musulmane, le rôle d’Abraham et le sens universel de sa vocation.
Il y a quelques années, il y a eu une vaste querelle internationale autour d’un projet d’une mosquée devant l’église de l’Annonciation à Nazareth. C’était un projet polémique alimenté par des motivations équivoques et tout n’était pas clair non plus dans certaines réactions. Ce projet-là ne vit pas le jour bien que le respect et la dévotion musulmane pour la Vierge de Nazareth soient sincères et généraux.
Ici, dans la vallée du Monastère, on rêve du contraire. Nous voudrions témoigner d’une vie commune empruntée à la commensalité, d’un espace public où le sacré reconnu comme pluriel est cordialement accepté et harmonieusement exprimé. Il est important de donner la juste valeur à l’appartenance aux traditions religieuses dans leur pluralité sans essayer de les contourner dans un syncrétisme équivoque, irréfléchi et kitsch.
En même temps, ni la foi chrétienne, ni la foi musulmane ne peuvent se rendre à l’idée d’une imperméabilité réciproque, ni ne peuvent céder à la tentation d’une absorption simpliste de l’altérité et au désir puéril d’un futur sans autre. Nous cherchons une harmonie dynamique dans l’aujourd’hui de nos appartenances, charismatiquement ouverte à un futur de plus en plus interactif et interfonctionnel dans lequel les expériences d’absolu spirituel universel véhiculées par nos traditions ne sont pas diluées dans une palude symbolique mais au contraire interagissent par le biais du dialogue, de la vie et du travail en commun, en vue de ce moment métahistorique qui tous nous attire et qui par moment arrive à percer l’écorce du temporel et il se rend présent, bien que voilé, à nos existences religieuses où il s’incarne dans nos pauvres fidélité.
Pour autant, nous voudrions nous rendre disponibles à un large accueil de cet espace culturel grandissant d’expérience spirituelle partagée (je songe à la galaxie New Age et aux différents mysticismes de racine indienne à la sauce post-capitaliste global) qui se veut simplement humain et qui quelquefois, prétendant naïvement représenter une instance métareligieuse, tombe dans un sectarisme involontaire, mais pas toujours innocent.
A Deir Mar Musa, nous travaillons à réaliser une petite maison d’édition qui voudrait participer au débat national et régional surtout en profitant des textes des conférences et des débats de nos séminaires. Adib Khoury, un ami de longue date, prof de math au lycée et très curieux culturellement, est venu vivre à Nebek, tout de suite après son mariage. Il sera le moteur et le directeur de ce projet. Nous avons publié ensemble en arabe à Damas et avec notre commentaire les articles de Louis Massignon sur la problématique de la Terre Sainte.
D’ailleurs sa femme Huda, également amie du monastère depuis des années, est chez nous comme comptable et secrétaire… Avec elle nous voudrions lancer le point de vente prévu sur le parking dans la vallée.
Les aides que vous nous envoyez nous servent à développer ces différents projets, afin de pouvoir continuer à accueillir gratuitement, pour être présents aux besoins des pauvres qui s’adressent au monastère et pour dépanner quelques familles aussi bien à Nebek qu’à Qaryatayn. C’est en notre nom et en leurs noms que nous vous remercions, ici par écrit, et dans le Seigneur, par la prière.
Certaines organisations qui nous ont aidées ont été citées dans d’autres passages de la lettre. Nous adressons un remerciement particulier à la Fondation allemande Hanns Zeidel consacrée au service du développement et de la paix, qui depuis de nombreuses années nous aide pour l’activité de formation culturelle.
Le Sénat de la République Française nous a donné un nouveau générateur électrique plus puissant et silencieux : une immense aide pour notre activité.
De même, la société Total-Damas nous donne un coup de main, en particulier pour les activités concernant l’environnement et nous espérons dans le futur faire davantage le domaine du parc et de la biodiversité.
Deux fondations hollandaises financent une recherche de doctorat pour une chercheuse syrienne dans le domaine de la gestion rationnelle et de la végétation des pâturages locaux. Evidemment, c’est tout à l’avantage de notre activité et de la région entière.
D’autres organisations d’Eglise, de partout dans le monde, nous aident régulièrement ou épisodiquement. Il ne nous semble pas opportun de publier ici leur liste. Mais il est certain et toujours opportun de dire notre profonde gratitude envers une solidarité d’Eglise multiforme, aimante, motivée et efficace.
La Communauté al-Khalil
En qualité de pièce jointe :
L’année 2005 a été marquée par la mort du pape Jean-Paul II et l’élection du pape Benoît XVI. L’immense participation mondiale pour ce passage de pouvoir sacré nous montre à quel point il y a soif, et pas seulement chez les catholiques pratiquants, d’une autorité spirituelle bien ancrée dans la tradition, en dialogue avec la société contemporaine et capable d’interpréter les aspirations et les angoisses d’énormément de monde ! Il n’empêche que l’immense charisme de Jean-Paul II laisse ouvert un chantier ecclésiologique sensible dont hérite son successeur. Celui-ci, connu comme un grand théologien et comme expression de la coagulation néo traditionaliste catholique, est probablement l’homme d’Eglise le plus à même d’entamer un aggiornamento de la structure de l’Eglise catholique en dialogue avec les acquis de la culture démocratique contemporaine. Cela est d’autant plus nécessaire que justement beaucoup d’espérances des gens se tournent aujourd’hui vers la Place Saint Pierre.
L’année écoulée a été une importante occasion pour nous tous de réfléchir à ce service d’unité spirituelle universelle que l’Eglise catholique se sent en devoir d’offrir. Elle a aussi été un moment où on a pu méditer sur la structure de l’Eglise en se demandant d’où elle vient et jusqu’à quel point elle peut changer, se développer, être reformée sur la base de nouvelles données anthropologiques, théologiques ou autres. En particulier, la rapidité actuelle de l’information peut permettre un système de consultation continuelle et minutieuse qui pourrait favoriser d’une façon factuelle le développement de la communion dans l’Eglise catholique et la relation avec les autres Communautés chrétiennes ainsi qu’avec les autres Traditions religieuses dans une profonde écoute des gens et de leurs besoins même en dehors de toutes appartenances.
Je voudrais attirer ici l’attention sur l’institution, tellement déterminante, du cardinalat (cf. Cardinal, in The Catholic Encyclopedia, www.newadvent.org). Toute la presse du monde s’est intéressée à cela en y voyant un nœud de pouvoir remarquable. La structure au fond est simple : le pape fait («crée») les cardinaux, les cardinaux font («élisent») le pape suivant et celui-ci fait tout le reste. Ainsi décrite c’est une structure que l’on pourrait appeler fermée ou peu ouverte. D’où vient-elle ? Dans le Nouveau Testament et les tous premiers siècles de l’Eglise, il n’y avait rien de cela. Mais oui, il y avait un Evêque de Rome, successeur de Pierre, mort martyr dans la capitale de l’empire romain. Cet Evêque avait conscience, ainsi que son Eglise, d’avoir un rôle de présidence de l’unité de la foi et de la charité dans toute l’œcoumène, c’est-à-dire dans l’Eglise universelle (justement catholique veut dire universelle mais avec une connotation plus théologique qu’organisationnelle). Et l’Eglise universelle, par ailleurs très plurielle en rites et traditions, lui reconnaissait ce service.
Normalement, chaque Eglise locale ou particulière avait ses propres structures, ses instances synodales (c'est-à-dire assemblaires) par lesquelles s’organisait le service de l’autorité et par lesquelles était assurée la succession aux différents sièges épiscopaux. Rome ne faisait pas exception. Il y avait donc et il y aura toujours des éléments communs qui dénotent une idée de l’Eglise et une pratique communes.
Certains disent que l’Eglise n’a jamais été et ne sera jamais une démocratie. C’est moins vrai que ce que l’on pense. Une large majorité de chrétiens reconnaît dans la foi que la source du service d’autorité dans l’Eglise réside dans son Christ et c’est Jésus lui-même qui l’a légué à ses apôtres, qui à leur tour la confie à leurs successeurs. C’est bien le sens de ce qu’on appelle la succession apostolique sacramentelle, donc le sacrement de l’ordre. Cela ne signifie pas que l’évêque (le successeur des Apôtres) d’une Eglise locale, d’un diocèse, puisse être élu ni qu’il puisse gouverner sans une vraie et responsable participation, soit des prêtres et des diacres qui l’aident dans ce gouvernement, soit du peuple chrétien, les laïcs y compris les consacrés, qui, avec lui, forment le véritable corps mystique de Christ, son Eglise. Le rôle des synodes de l’Eglise locale a toujours été décisif et il le reste pour l’efficacité d’une élection et du gouvernement qui en découle. Concrètement, la façon d’élire pouvait varier d’un lieu à un autre mais deux éléments sont toujours là, bien que de façons différentes. Il s’agit de la succession apostolique, garantie dans la collégialité apostolique, car le nouvel évêque sera sacré au nom de l’Esprit du Christ. Le deuxième élément est un consensus, une adhésion, un accueil qui vient et peut venir seulement de la base, de l’assemblée chrétienne.
Cet exercice de discernement d’Eglise s’est réalisé, comme on l’a dit, de différentes façons. Quelquefois, c’est une assemblée d’évêques - le plus souvent après une consultation des prêtres, des diacres et des laïcs les plus influents, en se mettant à l’écoute de l’Esprit (qui parle aussi par le biais des simples croyants et peut-être même parfois à travers la société locale et civile surtout les pauvres) - qui choisit le nouvel évêque. Normalement, une délégation d’évêques le consacrera au ministère épiscopal dans son diocèse, et donc dans un contexte d’approbation et d’accueil en assemblée de son Eglise. D’autres fois, ce sera plutôt une assemblée de l’Eglise locale, prêtres, diacres et peuple qui proposera un candidat à l’ordination épiscopale. Elle demandera à ce qu’il soit consacré par les évêques environnants, qui souvent participent ou assistent eux aussi à l’élection.
Pour étrange que cela puisse paraître, l’élection de l’évêque de Rome, le pape, le président de la communion universelle, est plutôt, à l’origine, du deuxième type, à l’évidence plus démocratique. En sa qualité de patriarche d’Occident, on pourrait s’attendre à ce qu’il fût élu par un large synode d’évêques, comme c’est le cas pour les autres patriarches en Orient. Et bien, ce n’est pas le cas. Pendant longtemps, des laïcs de la ville de Rome ont participé à l’élection. Et depuis le second millénaire de l’Eglise les électeurs étaient des diacres, des prêtres de Rome ensemble avec des évêques soit de la curie soit des alentours… et ce sont ces électeurs-là qu’on appelle les cardinaux. D’ailleurs jusqu’à aujourd’hui, les cardinaux en souvenir de cela sont répartis en trois ordres : diacres, prêtres et évêques. Quand quelqu’un aujourd’hui est « créé » cardinal de n’importe où dans le monde, il reçoit le titre d’une des Eglises des paroisses romaines ou d’une des Eglises cathédrales des diocèses des alentours.
De fait cette institution, tellement centrale dans l’Eglise, n’a jamais arrêté d’évoluer jusqu’à devenir un collège cardinalice formé par ceux qu’on a longtemps appelé : les Princes de l’Eglise. L’analogie est évidente avec les royaumes de ce monde. Et cela n’étonne pas car le pape était aussi, pendant plusieurs siècles jusqu’en 1870, le roi d’un vaste état dans le centre de l’Italie. C’est d’ailleurs à l’époque, où l’autorité s’est organisée d’une façon tout à fait totalitaire dans la plupart des états d’Europe, que l’institution cardinalice s’est assimilée à une oligarchie qui assure continuité et indépendance au pouvoir pontifical et de fait participe largement à ce pouvoir.
Ce n’est pas surprenant de voir que le souci d’indépendance des pouvoirs et des intérêts séculiers, et donc nécessairement laïcs, de la part de l’Eglise, jalouse de son rôle originaire et de sa mission universelle, a conduit à une sorte de séparation institutionnelle entre la hiérarchie et le peuple croyant. Il a fallu attendre le Concile Vatican II (1962) pour commencer à inverser la tendance, dans un sens à nouveau participatif.
Au fur et à mesure que les moyens de communication et de transports se sont facilités, le collège des cardinaux s’est élargi en incluant les chefs des Eglises des grandes villes italiennes, pour la plupart capitales d’état politique et ainsi qu’aux chefs des Eglises des grandes capitales catholiques d’Europe. Suite à la fin des Etats Pontificaux au dix-neuvième siècle, la structure cardinalice, avec toute l’Eglise, tend à une progressive et plus profonde universalisation et donc à une perte de pouvoir de la part des italiens qui a fini par permettre l’élection du pape polonais et ensuite du pape allemand… mais il aurait pu être facilement argentin ou nigérian ou chinois.
Le fait qu’aujourd’hui, dans l’Eglise latine - qui constitue la grande majorité de l’Eglise catholique (car il ne faut pas oublier que les Eglises orientales catholiques gardent une structure patriarcale synodale) - tous les évêques soient nommés, directement par le pape, à leur diocèse, d’une façon semblable à celle des préfets des département français, fait que l’on ne voit plus bien la différence substantielle entre le collège des cardinaux et le synodes des évêques… Reste a différence que les cardinaux font le pape !
Il est intéressant de noter que l’institution cardinalice se trouve dans un flou théologique. Dans aucuns des documents du Concile Vatican II, on ne trouve un mot ecclésiologique pour nous expliquer la spécificité de cette institution et il en est de même pour le Catéchisme de l’Eglise catholique, rédigé en très grande partie par le Cardinal Ratzinger.
Ce fait est d’autant plus étonnant que, dans la pratique de la vie de l’Eglise, non seulement les cardinaux passent devant les archevêques de n’importe où dans le monde, mais même, ce qui a été toujours contesté par les orientaux, avant les Patriarches des Eglises apostoliques d’Orient.
De deux hypothèses, l’une : ou bien, on se trouve devant une équivoque ecclésiologique consolidée qui fait que, du fait même d’être électeur du pape, les cardinaux, qu’ils soient de l’ordre des évêques, des prêtres ou des diacres, doivent passer devant tout le monde. Ce qui pose une question majeure, car l’ecclésiologie la plus orthodoxe nous dit que le pape n’est pas un autocrate, mais qu’il guide l’Eglise à la tête d’un collège qui est celui des évêques, ses frères. Ou bien, deuxième hypothèse, dans cette institution cardinalice se cache une réalité ecclésiologique qu’il faudra découvrir, expliciter et exprimer à nouveau.
Quand le pape Benoît XVI a été élu, il a explicitement déclaré qu’il avait été élu par un collège de cent quarante évêques de toute l’Eglise. Il a ainsi implicitement souligné la dimension épiscopale synodale de son élection. Et d’ailleurs nombreux sont les théologiens qui trouvent que le pape en tant que président de la communion universelle, devrait être élu par le Concile œcuménique des évêques de l’Eglise universelle ou bien par un collège, un synode, de leurs représentants. Mais il n’en est pas ainsi.
Le fait qu’aujourd’hui les cardinaux soient tous des évêques, et presque tous évêques des siéges importants, ne change pas l’essentiel de la question. Car à l’origine, et au moins symboliquement jusqu'à aujourd’hui, c’est l’assemblée de l’Eglise romaine avec les diacres et les prêtres des paroisses de la ville et les évêques des diocèses des environs qui élisent le pape. Cela veut dire qu’un aspect essentiel de l’épaisseur ecclésiologique du cardinalat vient, en définitive, de l’originaire représentativité du peuple chrétien, hommes et femmes, d’une Eglise locale. Donc, de cette façon, on comprend mieux que le premier titre du pape, le plus originaire, soit celui d’évêque de Rome.
Cela n’empêche nullement, surtout aujourd’hui, que la dimension d’assemblée de l’Eglise universelle et de la collégialité du service épiscopal ne puissent et ne doivent jouer un rôle central dans l’élection du Pasteur de tout le troupeau du Christ.
Depuis mon enfance, sur la base de l’enseignement du Concile Vatican II, on nous parle de l’apostolat des laïcs, de la participation authentique de tout chrétien au mystère du Christ, et de son Eglise, envoyé pour sauver le monde (cf. Lumen Gentium 33). L’Eglise, le Peuple de Dieu, est toute apostolique ; et si les évêques sont les successeurs des apôtres cela n’enlève rien à l’apostolicité du peuple chrétien. On dira aux chrétiens, dans les classes de catéchèse : « Soyez tous des vrais diacres, des gens de service dans la charité et la justice; soyez tous, d’une façon sacerdotale engagés à la sanctification et la consécration à Dieu de vos milieux de vie ; soyez tous des apôtres, tous des pasteurs, des responsables, des « surveillants », donc des « évêques », chacun dans sa famille, son milieu et lieu de travail, sa mission. Participez activement dans une collaboration inventive dans vos communautés d’Eglise et dans l’unique communauté de l’Eglise catholique…». Et alors pourquoi ne pas leur dire aussi : « soyez tous des «cardinaux», des gens qui savent exercer un service d’écoute et de représentation ainsi que de collaboration loyale avec la personne élue pour présider à l’unité de la doctrine et de la charité ». Les cardinaux devraient être, et Dieu merci ils le sont souvent, des modèles pour tout bon catholique. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils sont habillés de pourpre, en souvenir des hommes et des femmes martyrs de l’Eglise de Rome.
Il me semble qu’en racine, l’institution cardinalice synthétise, pour ainsi dire, une idée de l’Eglise qui, tout en respectant pleinement le rôle et la valeur de la succession apostolique et du sacerdoce ministériel sacramental, sait exprimer (ou plutôt a su exprimer dès l’origine) la valeur profonde de la participation de tout le clergé à la synodalité, de la dimension d’assemblée de l’Eglise locale en représentant aussi la responsabilité et la communion efficace avec tout le Peuple de Dieu.
Cela ne concerne pas seulement l’Eglise de Rome, l’Eglise des cardinaux et du pape. Mais bien au contraire, il y a là, exprimé d’une façon plus claire peut-être, une dimension essentielle de la vie et de la constitution de l’Eglise locale en tant que Peuple de Dieu. Le Concile Vatican II en a souligné l’importance et le rôle. Il l’a redécouvert et proposée à tous les chrétiens, tandis que les Eglises Orientales, qui restent institutionnellement synodales, ont en grande partie gardé cette constitution originaire tout au long de leur histoire.
Un chrétien qui a découvert sa dimension de « cardinal », sera quelqu’un qui sait unir, dans sa vie avec le Christ, une pleine assomption de responsabilité, tant institutionnelle que charismatique-prophétique, à un sens aigu et théologique d’appartenance à une assemblée du Peuple de Dieu où chacun a sa place et son rôle et où la voix de chacun est écoutée, et paradoxalement d’autant plus écouté qu’elle est la voix des petits du Royaume, les pauvres et les laissés pour compte, (comme par exemple les veuves auxquelles s’adressaient une si grande écoute et attention dans l’Eglise primitive des Actes des Apôtres).
Une femme, un homme chrétiens auront su être « cardinal » quand ils auront pu unir un engagement fort, et motivé dans l’Evangile, dans l’Eglise locale tout en gardant une perspective, une vision, un exercice de la communion, un service de l’unité tout à fait universel : ils seront universels dans leur lieu de vie autant qu’ils sauront être particuliers et pluralistes dans l’universel. Il me semble que si on comprend de cette façon dynamique le rôle des cardinaux par rapport à l’assemblée du Peuple de Dieu, il en découlera une capacité renouvelée des chrétiens à écouter, à servir, à reconnaître, à mettre en valeur, en un mot, à aimer l’ensemble, l’assemblée de la communauté humaine. Car l’assemblée chrétienne est en vue de l’unité et de l’harmonie de la communaute humaine; elle se consacre au service de cette unité et elle la préfigure.
Je rêve d’une Eglise universelle dans ce sens pleinement « cardinalice ».
De fait c’est d’une façon plutôt paradoxale que je m’exprime ainsi à partir de l’analogie avec l’apostolicité de toute l’Eglise. En effet, j’emploie ici cette expression sans pour autant la proposer en candidate à une consécration lexicale. Dans un certain sens je voudrais, au contraire, démystifier une sacralisation probablement excessive du cardinalat, afin de la dépasser dans une redécouverte de la synergie entre tradition apostolique (véhiculée par le sacerdoce ministériel, le service collégial d’autorité dans l’Eglise et la diaconie pétrinienne du pape) et dimension d’assemblée et de responsabilité partagée du peuple chrétien.
Je rêve d’une Eglise où le rôle du clergé serait en tous temps au service de l’éclosion printanière des charismes prophétique, sacerdotal et royal (et royal aujourd’hui se traduit par le concept démocratique de participations et de responsabilités politiques, environnementales, sociales, etc.) du Peuple de Dieu toujours rassemblé autour de la table eucharistique.
Je rêve d’un choix des diacres et des prêtres qui soit vraiment l’expression de la communion, pleinement adulte et responsable, entre l’assemblée paroissiale et l’évêque du diocèse, qui représente le service de l’autorité du Christ, aidé par son presbytère.
Je rêve d’élections épiscopales, partout dans le monde, où il y ait participation efficace du peuple croyant et du presbytère. L’expression du leadership pour le diocèse sera donc en obéissance à l’Esprit, qui parle aussi dans le milieu culturel et interreligieux dans lequel les Eglises vivent et vers lequel elles sont envoyées. Cela doit être en harmonie avec le rôle de l’Eglise régionale ou patriarcale et avec l’instance finale représentée par le Saint-Siège romain lequel constituera toujours, avec l’aide de Dieu, une garantie d’indépendance, de fidélité, d’universalité, pour les Eglises locales.
Je rêve que cela soit vrai dans toute la vie de l’Eglise ; je le crois possible pour toutes les charges des plus locales aux plus universelles. Je pense que les cardinaux pourront être en majorité les présidents des grandes assemblées épiscopales, nationales et continentales, choisis à travers la pratique de la communion entre l’autorité locale et l’universelle sans jamais oublier l’écoute de la voix du peuple et du cri des opprimés.
Je rêve que le prochain pape soit choisi par des patriarches et des cardinaux qui, avant de faire le voyage, auront su se mettre en attitude de service de l’Esprit de Dieu qui parle dans leurs peuples, car c’est en cela que réside le propre de l’autorité évangélique. Ils viendront donc à Rome, et encore une fois, ils se mettront à l’écoute du peuple des paroisses et des quartiers de la ville, dont ils portent les titres et dont ils vont élire l’évêque, car ce peuple croyant de Rome a pour vocation d’être en pleine solidarité avec le service universel de son chef spirituel.
Ce ne sont peut-être que des rêves. Certains estiment que l’Eglise d’aujourd’hui retrouve une attitude paternaliste et une préoccupation cléricale de bien garder les laïcs, et donc radicalement les femmes, en dehors des lieux de décision. De plus, et bien que l’histoire récente de la théologie catholique ait beaucoup souligné la valeur de la collégialité, de la communion et de la subsidiarité, il y a de quoi craindre une radicalisation de la centralisation romaine facilitée par la rapidité et la globalité des moyens de communications : par le passé on disait que Rome était lointaine, pour dire qu’on gardait une certaine autonomie… aujourd’hui elle est partout ! Le futur pape sera probablement élu, encore une fois, par un collège d’hommes choisis et nommés par ses prédécesseurs : plutôt des princes de l’Eglises que les diacres, les prêtres romains et les évêques du Peuple de Dieu.
Nombreux tout de même sont ceux qui voient dans l’élection du pape Benoît XVI, le pape théologien - un des intellectuels catholiques qui a participé à réaliser Vatican II - l’homme qui sera à même de faire des pas vraiment décisifs dans l’aggiornamento de la structure de l’Eglise, dans une ouverture authentiquement théologique aux besoins, aux misères, aux aspirations et aux richesses de l’humanité d’aujourd’hui. Peut-être que ce sera lui l’homme qui pourra rassembler un autre Concile enfin œcuménique !
Gardons toujours l’espérance, car les temps de Dieu ne sont pas les nôtres. Cela relève de la responsabilité de chacun d’éviter que l’Eglise catholique ne tombe à nouveau malade de sectarisme et de repliement identitaire. Il y a toujours une souffrance du Fils de Dieu dans son Corps, une kénose de l’Esprit divin dans notre aujourd’hui ecclésial. Reconnaissons-le avant tout dans nos fautes et prétentions personnelles et collectives. Mais enfin, nous croyons en la résurrection; elle est notre destin de disciples de Jésus de Nazareth, depuis l’aujourd’hui de notre histoire.
Certains vont s’étonner que j’aie mis ensemble la géopolitique moyen-orientale avec nos nouvelles de famille et une aventureuse considération d’ecclésiologie. Avons-nous réussi à prendre le « cardinal » pour modèle du croyant qui, entièrement enraciné dans sa communauté historique locale et dans la profondeur de sa tradition, ainsi que pleinement solidaire avec elle, est tout de même capable d’une vision universelle généreuse et engagée ? Si oui, il sera plus facile de voir la relation entre notre vision par rapport à la mission de l’Eglise universelle et notre engagement local dans tous ses dimensions et aspects.
Je voudrais dire ici la gratitude de notre Communauté envers notre évêque Georges Kassab, les membres de son presbytère ainsi qu’envers les gens de l’éparchie syriaque-catholique de Homs, Hama et Nebek. Avec eux, nous faisons une expérience d’écoute, de communion et de coresponsabilité qui nous fait bien espérer.
Encore une fois je me dois de m’excuser car cette lettre a pris une tournure trop longue et trop personnelle pour être celle des amis de notre Communauté monastique. C’est moi, Paolo, qui l’ai écrite, avec l’aide d’Eglantine, mais c’est l’affection de tous les membres de la Communauté que je voudrais enfin vous représenter en demandant pour chacun, en cette fête de Noël, une expérience personnelle et authentique de la tendresse de Dieu.
pPaolo
Note: s´il vous plait, pourriez-vous imprimer cette lettre et la donner à ceux parmi vous qui voudraient la lire mais qui n´ont ps d´accès à Internet. De plus, évidemment, c´est bien de la partager via Internet avec d´autres. Mais ne vous étonnez pas donc de la recevoir peut être plusieurs fois et en plusieurs langues !