Chers amis, nous sommes dans une crise financière préoccupante. Nous n’avons pas contracté de dettes et nous ne pourrions même pas en contracter car nous n’attendons pas de revenus tels que nous puissions restituer des sommes importantes. Les motifs de notre crise sont une reprise trop lente du tourisme, la diminution plus ou moins forte de quelques aides essentielles, presque régulières dans le passé, l’augmentation du coût de la vie et de la valeur de la lire syrienne face au dollar et à l’euro, et les demandes pressantes d’aides pour les pauvres parmi lesquels les réfugiés irakiens. Certains d’entre vous nous ont souvent dit : « Si vous vous trouvez face à une difficulté particulière, faites-le-nous savoir, vos urgences sont aussi les nôtres. Laissez-nous rêver avec vous, faites-nous sentir que Deir Mar Moussa nous appartient ! »
Nous sommes engagés dans divers projets financés par des organisations publiques et privées, mais il s’agit toujours de fonds destinés à des objectifs bien précis. Le chantier de Deir el-Hayek (monastère des femmes et centre d’exercices spirituels, de séminaires, etc.) manque d’aides pour sa phase finale.
Salutations
Nous sommes habitués, depuis de nombreuses années, à vous envoyer cette lettre, avec plus ou moins de retard. Nous espérions, cette fois-ci, vous souhaiter à temps un bon Noël et une heureuse Nouvelle Année. Au moment où nous vous écrivons, a lieu le Pèlerinage musulman à La Mecque ; nous sommes unis spirituellement à nos amis et à leurs familles en cette période de grâce et de pardon.
Le soir, pèlerins et voyageurs venus des quatre coins du monde se réunissent dans la belle église du monastère pour la méditation en silence et pour la Messe. La prière reste essentiellement en arabe, qui est la langue liturgique de notre consécration d’amour à l’amitié islamo-chrétienne et de notre adoration commune du Miséricordieux. L’adoration de la Parole incarnée dans la grotte de Bethléem, symbole de paix perdue et née à nouveau, et l’adoration musulmane de l’Unique, qui se transmet à l’intime de tout croyant, ne sont pas des cultes séparés, mais elles constituent ensemble la réponse sincère des cœurs à l’Amour du Très Haut. Avec une journaliste de Changhai, nous parlions des chrétiens et des musulmans arrivés en Chine au Moyen-Age en passant par l’Himalaya, et nous rêvions d’un lieu pour l’éducation à l’harmonie interreligieuse pour les jeunes sur le toit de l’Asie.
La Communauté Monastique
A Deir Mar Moussa, ce mois de décembre est consacré aux exercices spirituels. Cette année, Sœur Houda donne les exercices au novice Youssef. C’est une belle chose car, jusqu’à maintenant, seul Paolo offrait ce service. Ayant terminé ses études romaines avec succès, Houda est désormais pleinement dans la vie de Deir Mar Moussa et elle a retrouvé toute sa luminosité.
Ces jours-ci, nous lisons et nous commentons la lettre encyclique du Pape Benoît sur l’espérance. Cela nous donne l’occasion de réfléchir sur le sens de notre vie, prière, travail, accueil, dialogue… ensemble. Nous avons décidé de combattre le pessimisme, un poison terrible qui rend toute chose noire avant même de la tuer. En communauté, dans nos relations et nos programmes, nous cherchons à nous ouvrir sur l’espérance, celle qui est vraie, présente, humble, dans les détails et les « plissés » de la vie quotidienne qui est déjà la vie du Règne des Cieux.
Nombreux, cette année, ont été pour nous les signes d’espérance. En septembre, Jihad a été ordonné diacre dans son village maronite, entouré de l’affection de ses proches. Nous prions pour que, malgré la maladie, son papa ait la joie de participer, si Dieu le veut, à l’ordination sacerdotale en juillet prochain.
Après deux ans en tant que volontaire et un an en tant que postulante, Diane a remis à plus tard un pèlerinage avec un âne pour entrer au noviciat en septembre dernier, la veille de la Fête de la Croix. En janvier, Houda et elle feront un pèlerinage au Jourdain pour visiter le lieu du Baptême du Seigneur (ce lieu fut aussi celui de l’enlèvement du Prophète Elie et du passage de l’Arche de l’Alliance, ainsi que celui de l’ermitage de Marie l’Egyptienne). Une certaine complicité entre les marmoussiens et les franciscains du Mont Nébo est en train de se créer, ces derniers ayant déjà reçu Paolo et Boutros.
Paolo était allé jusqu’au Jourdain avec le groupe international du Chemin d’Abraham. Boutros a voulu lui aussi y aller, tout seul, pour toucher cet unique endroit de la Terre Sainte que les chrétiens arabes peuvent aussi visiter. Pour nous, c’est comme une promesse de pouvoir un jour visiter en paix Nazareth, Bethléem, Jérusalem et la tombe, à Hébron - al-Khalil, de notre Patriarche commun Abraham.
Depuis le mois d’octobre, le novice Daniel passe une grande partie de la semaine avec le Père Jacques au monastère de Mar Elyan, à Qaryatayn, pour préparer son brevet de collège. Diane les rejoint pour suivre un cours d’arabe et, en échange, elle propose des leçons de français aux enfants de son enseignante qui est spécialisée en sciences islamiques. Deir Mar Elyan commence vraiment à renaître. Une partie de la nouvelle cour est désormais utilisée et l’église reconstruite accueille la prière du petit groupe monastique.
La maman du Père Jacques nous a laissés en septembre pour le Ciel. Ce fut un grand moment dans notre vie car madame Imelda nous avait tous adoptés, surtout durant ses années de présence à Qaraytayn. Ses funérailles à Alep, avec les Sœurs compagnes de sa fille Victoria et notre communauté autour de Jacques, nous consolèrent tous, car elles nous firent sentir que, à la fin, ce monde se met, pour ainsi dire, de côté pour laisser passer le monde illuminé par le Christ, soleil qui ne se couche pas.
A Cori, près de Rome, nos étudiants, Jens, Jihad et Deema, continuent à approfondir leur relation avec la communauté paroissiale qui les reçoit. Notre maison de San Salvatore est aussi un lieu de rencontre et de prière en communion avec les Eglises orientales et la Communauté musulmane. Ce serait beau de pouvoir fonder à Cori une confrérie qui assure la continuité de présence de notre charisme et qui serve de lieu de référence à nos amis italiens.
Cet été, Jens est retourné en Iran pour continuer à resserrer le lien qui devrait nous permettre, dans les prochaines années, d’initier une présence stable. Nous pensons à Tabriz, mais rien n’est encore certain.
Mary, notre amie anglaise psychothérapeute pendant trente ans en Toscane, a passé un an avec nous à Deir Mar Moussa, attendant un signe du Ciel. Ensuite, elle est retournée en Italie pour un mois durant lequel elle a été agressée par un malade mental inconnu qui l’a mise en très grave danger. Le Seigneur est intervenu. Maintenant notre Mary va mieux et nous l’attendons en Syrie au plus tôt. Nombreux sont ceux qui l’attendent : réfugiés irakiens, membres de la Communauté, personnes en difficulté, amis.
Globe-trotter
Cette année, Paolo a vraiment exagéré avec les voyages : après trois jours passés en Finlande, en décembre 2006, et le voyage annuel en Europe, en février, entre autres pour found raising, Paolo est parti en Nouvelle Zélande en mai pour un séminaire de l’ONU organisé par l’Alliance des Civilisations. En juillet, il était en Bretagne pour participer au pèlerinage islamo-chrétien des Sept Saints et pour visiter la tombe de son maître vénéré Louis Massignon. Il a poursuivi son voyage à New York et à Washington afin de participer à deux séminaires de jésuites consacrés au dialogue avec l’hébraïsme et l’islam. En septembre, il est allé dans le nord de l’Iraq pour donner les exercices spirituels aux clergés chaldéen et syriaque de Mossoul. Cette relation de solidarité avec les Irakiens et nos amis de l’Eglise d’Iraq est vraiment significative pour nous. Elle devient aussi une aide autant que possible concrète pour faire face aux urgences les plus graves. En octobre, Paolo fut reçu au Vatican et rencontra, avec beaucoup de consolation, le nouveau Président du Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux, le Cardinal J. L. Tauran et le nouveau Préfet de la Congrégation pour les Eglises Orientales, le Cardinal L. Sandri. Nous renouvelons notre gratitude au Cardinal Moussa Daoud, notre Evêque et Patriarche dans les années quatre-vingt-dix : depuis Rome, il a suivi notre croissance ; il a aussi posé les questions importantes et facilité le discernement du Saint-Siège sur la validité de notre vocation et de notre perspective théologique, surtout face à la relation islamo-chrétienne. Ensuite, à Barcelone, Paolo a donné les exercices spirituels aux cadres des Communautés de l’Arche de Jean Vanier, qui se consacrent aux personnes ayant un handicap mental. Enfin, à Paris, il a participé au colloque sur le Futur des Chrétiens d’Orient, parrainé par le Quai d’Orsay. Durant son intervention, il a essayé de réagir face au pessimisme ambiant, conseillant une vision qui ne soit pas celle de la concurrence islamo-chrétienne ni d’improbables évolutions envers la laïcité de ces sociétés, mais plutôt d’évolutions plurielles construites sur la complémentarité culturelle et théologique et sur les espérances convergentes.
La Communion dans l’Eglise Locale
On peut comprendre l’inquiétude de notre Evêque, le cher Monseigneur George Kassab, et celle de la Communauté, pour ce responsable globe-trotter, surtout durant cette phase d’élaboration d’une décision plus définitive d’Eglise sur notre vocation. Paolo soutient que ses voyages ont été une expérience exceptionnelle qui lui a fait sentir la portée universelle de notre perspective abrahamique, cueillant des lignes de sens, des rayons d’aspiration à la paix dans la justice face à Dieu, de femmes et d’hommes de tout continent.
Monseigneur Kassab a estimé qu’il était de son devoir de représenter les difficultés d’une partie de l’Eglise locale à l’égard de notre vocation au dialogue et de notre projet d’un Visitor Center interreligieux, dans le cadre du Parc naturel qui est en voie de réalisation dans la vallée de Deir Mar Moussa. La Communauté s’est alors engagée dans le dialogue ecclésial et, encore une fois, nous avons expérimenté la force et la portée de la prière, qui ouvre des voies de compréhension inespérées et qui rend l’obéissance fructueuse, même celle qui coûte. Maintenant, grâce à Dieu, tout va bien mieux mais, aussi à cause de la situation d’incertitude de notre Eglise Syriaque dans son ensemble, on a décidé de renvoyer toute décision canonique de fondation. Nous avançons tranquillement et de la façon la plus ecclésiale, confortés aussi par l’approbation romaine à notre règle. Cela fait déjà vingt-cinq ans que le Seigneur a montré cette voie à un jeune jésuite italien et plus de vingt ans que l’Eglise locale et le Saint-Siège à Rome ont suivi ce chemin avec attention et l’ont encouragé. Nous cherchons donc à être fidèles et sereins.
L’Engagement Culturel
En juillet, a eu lieu le séminaire habituel. Cette année, à cause des réactions ecclésiales négatives, nous avons dû renoncer à la dimension interreligieuse explicite pour nous rabattre sur la dimension interculturelle. Le résultat fut vraiment encourageant : une centaine de jeunes de toutes les appartenances de la société syrienne ont discuté et interagi pendant trois jours, s’interrogeant sur « La Rencontre Interculturelle et la Jeunesse de Demain ». Tous ont l’impression que cela vaut la peine, dans le futur, de poursuivre le même chemin. La presse s’est intéressée à l’initiative avec sympathie et les jeunes continuent à nous rendre visite. Durant ce séminaire, s’est déroulée aussi une rencontre de dialogue intermusical réunissant de jeunes musiciens européens de musique baroque et leurs collègues syriens de musique arabe. Après quatre jours de répétitions, ils ont proposé un magnifique concert dans le porche du Visitor Center, en présence de notre Evêque et de plus de cinq cents spectateurs venus de Nebek. Ils ont communiqué un sentiment authentique et réconfortant d’harmonie et de beauté. Diane présentait les morceaux avec passion et en arabe. La seconde soirée à Hama fut aussi un succès.
Dans le cadre de notre engagement culturel, nous avons décidé d’inaugurer, en octobre, après le Ramadan, notre petite et précieuse bibliothèque du dialogue, pour exprimer notre gratitude et notre considération envers les nombreuses personnes et institutions qui ont aidé à sa création et à son développement. Parmi elles, nous remercions chaleureusement l’Oeuvre d’Orient (organisation catholique parisienne) qui a contribué à la construction de la nouvelle salle de lecture. Ces dernières années, la bibliothèque a bénéficié de l’engagement de deux volontaires françaises du SCD (Service de Coopération au Développement, association située à Lyon) : Eglantine et, depuis 2006, Nathalie. (Bien que de nouveau en France, Eglantine continue à collaborer avec nous et prépare un livre de théologie du dialogue avec Paolo ; Nathalie, que beaucoup d’entre vous connaissent, assure, avec maestria et une patience affectueuse, le travail complexe du secrétariat du monastère.) Le Professeur Consorti, de la Fondation Remo Orseri et de l’Université de Pise, est venu pour l’inauguration en tant que représentant du Président de la Fondation, le Professeur Pietro Scoppola, qui tenait tant à ce rendez-vous mais que le Seigneur a rappelé à lui peu de jours avant. La Fondation Orseri nous est proche depuis longtemps, soutenant notre engagement culturel. Son nouveau Président, le Professeur Andrea Riccardi, fondateur de la Communauté chrétienne romaine de Sant Egidio, est un vieux et très cher ami de Paolo, et nous espérons, dans le futur, continuer à collaborer de façon efficace.
Les personnes présentes lors de l’inauguration étaient qualifiées et motivées. Le Mufti local nous avait communiqué sa solidarité, insistant sur la valeur du Livre comme l’origine de la signification du Monde. Dans ce cadre, un temps de silence intense, dédié à la mémoire de l’ami et du maître Pietro Scoppola, plaça notre rencontre au cœur du dialogue le plus significatif et de plus grande responsabilité. Une table ronde sur les défis de la bibliothèque d’aujourd’hui engagea des représentants de diverses bibliothèques et universités locales. Le jour suivant, au Centre Culturel Italien à Damas, le Professeur Consorti tint une conférence très appréciée (entre autres, par le Nonce Apostolique) sur le concept d’Etat laïc dans le cadre méditerranéen (cette conférence sera publiée dans notre site et dans celui de la Fondation Orseri).
La Maison d’Edition
Adib et Houda habitent désormais Nebek, dans une petite maison restaurée appartenant au Monastère. Ils sont devenus les parents d’une petite fille très douce et ils collaborent avec nous respectivement comme responsable des éditions du Monastère et comme comptable. Notre maison d’édition, reconnue par le gouvernement, s’appelle Dar el-Khalil lin-Nashr, nom qui se réfère à Abraham l’ami (Khalil) de Dieu. Nous comptons publier des volumes en arabe à partir des conférences et des séminaires de dialogue. Nous avons déjà publié un volume sur « La Problématique de la Reconnaissance de l’Autre », une traduction d’articles sur la Terre Sainte de Louis Massignon et un rapport sur une rencontre œcuménique de jeunes de 2001 intitulée « Je mets mon Espérance en toi ». Sont en préparation : un livre de chants, un recueil de conférences sur « L’expérience spirituelle et son impact social » et une traduction du Directoire Spirituel du Bienheureux Charles de Foucauld.
Deux jeunes amis de Damas collaborent avec Adib et Jens pour créer un site internet entièrement en arabe, intitulé « Al-Khalil ». Quand il sera prêt, bientôt inch’Allah, vous trouverez le link dans le site de Deir Mar Musa.
La Dimension Environnementale et Agricole
Raphaël, le nouveau volontaire français de la DCC (Délégation Catholique pour la Coopération), est arrivé à Deir Mar Moussa en octobre. Il remplace Stéphane Heudes qui a rejoint sa fiancée en Algérie après un an de fructueux service. Stéphane nous laisse comme souvenir un magnifique pigeonnier qui devrait bientôt offrir un bon complément de protéines à notre diète. Il a aussi soigné la croissance du projet agricole de Qaryatayn et a développé ultérieurement la relation avec le CCFD (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement).
Raphaël est un ingénieur de 26 ans spécialisé dans le développement rural. Il est heureux de servir le Seigneur et le Monastère. Il y a deux ans, il avait passé trois mois avec nous, dont un mois pour participer aux exercices spirituels avec Paolo. Suite aux exercices, il avait demandé le baptême. Cette année, il a exprimé le désir de revenir pour mieux connaître la Communauté.
En avril, s’est déroulée la dixième édition de notre Journée de l’Environnement avec les divers partenaires locaux. Elle portait sur les dynamiques scientifiques, culturelles et sociales liées au projet du Parc et du Visitor Center. Cette édition, ainsi que d’autres activités culturelles, sont financées par la générosité de la Fondation allemande Hanns Seidel qui nous suit fidèlement depuis de nombreuses années, nous aidant aussi à former techniquement nos collaborateurs laïcs.
La quatrième édition du séminaire des apiculteurs a eu lieu en novembre. Il est intéressant de noter qu’il s’agit d’une activité très appréciée par les musulmans qui considèrent les abeilles, vu l’éloge coranique, comme un petit peuple de croyants.
Les bâtiments de Deir el-Hayek et de Deir el-Huqab
En décembre 2007, a été réalisée la grande coulée de béton armé du toit de la dernière aile importante de l’édifice prévue par le projet de Deir el-Hayek (le monastère des femmes). Nous avons désormais 15 chambres, une cuisine pour les groupes, un parloir, une salle polyvalente de 100 places, un portique avec un oratoire situé dans les grottes des anciens ermites, des réservoirs, des salles de bain, des toilettes, des greniers et des caves. En 2008, nous comptons mettre à disposition six autres chambres, d’autres toilettes et salles de bain, une chapelle pour trente personnes, une blanchisserie et une petite cuisine. Nous aurons ainsi 21 chambres. Nous désirons développer le service des exercices spirituels et, outre les rencontres interreligieuses, des cours de théologie. Nous espérons finir les travaux, avec votre aide, d’ici deux ans. Il manque encore quatre pièces, un grand réservoir d’eau, un mur d’enceinte d’une trentaine de mètres avec des cellules plus isolées le long du mur où il est possible de construire. Il nous reste à terminer la tour de l’ascenseur qui servira aussi de clocher, mais il faudra aussi changer de téléphérique pour le transport éventuel de personnes en difficulté.
Beaucoup d’entre vous se souviennent de l’enclos, dans les grottes au nord du monastère (Deir el-Huqab). Les chèvres et les moines vivaient en bon voisinage. Suite à l’institution du Parc, nous avons déplacé la résidence des chèvres dans un nouveau et magnifique espace à l’ouest (où se trouvait le grand garage construit en 1989). Il y a aussi une pièce pour les retraites spirituelles de Paolo qui, le dimanche soir, dit la Messe aux bergers d’une famille bédouine chrétienne de Qaryatayn. Par contre, le vieil enclos et les grottes ont été transformés en huit pièces, en toilettes et en salles de bain pour les moines et les hôtes. Notre mulet nous a quittés pour de meilleurs pâturages et son écurie sera bientôt transformée en poulailler… Chiens, chats, pigeons et poules mangent tous dans les mêmes mangeoires ! Même les petits oiseaux et le renard passent volontiers par là.
Le chauffage
Nous voudrions toujours offrir à nos invités un lieu calme et confortable, adapté au repos et à la prière. Dès le début, nous avons utilisé pour nous chauffer des poêles à mazout, les fameuses sobias. Elles sont un peu nocives pour la santé et leur utilisation est compliquée. On ne peut pas les laisser allumées durant la nuit ; ainsi nos hôtes souffrent du froid. L’hiver à 1300 mètres d’altitude est rude et long, et nous cherchons une solution plus efficace et plus écologique. C’est pourquoi nous aimerions installer un chauffage central solaire et à gaz dans l’ancienne partie du monastère qui est la plus utilisée par les visiteurs de passage et pour la vie collective. Nos amis de Vicence essaieront d’offrir leur soutien technique, mais il faut trouver d’autres bienfaiteurs frileux pour réussir cette entreprise. Cette opération devrait rendre l’hospitalité plus agréable et donc augmenter le nombre de présences dont dépend aussi notre équilibre financier.
Les appartements à Nebek
Vous savez déjà que nous avons acheté, il y a plusieurs années, une grande maison en ruine du XIXe siècle à Nebek. Maintenant nous avons presque terminé de la démolir et nous avons transporté et remonté les parties en pierre au monastère d’el-Hayek. Le terrain à Nebek est désormais libre pour bâtir des appartements que nous proposerons à loyer équitable à nos collaborateurs. Concrètement, le problème du coût élevé de l’immobilier oblige les jeunes à s’expatrier longuement pour gagner de l’argent et à différer leur mariage indéfiniment. Le terrain constructible est de presque cinq cents mètres carrés et on peut bâtir deux étages avec une belle cour pour héberger au mieux huit familles. Nous avons intéressé une fondation amie à ce projet et nous attendons une réponse. Nous vous tiendrons au courant ! Il s’agit d’un projet important pour sauvegarder l’équilibre communautaire interreligieux de la ville de Nebek où la communauté chrétienne risque de finir au-dessous de 1% vu l’émigration interne et internationale.
Le Visitor Center
Nous souhaiterions vous entretenir brièvement de l’évolution positive du projet du Visitor Center de Deir Mar Moussa, lié directement au développement du Parc et géré en partenariat avec l’administration publique et les associations non gouvernementales locales. L’Etat syrien a décrété l’attribution de 35 autres hectares à ce projet. Nous sommes en train de lancer, avec un financement européen et la collaboration avec l’association COSV de Milan, un concours pour étudiants en Architecture et aux Beaux- Arts qui seront invités à exprimer un espoir d’harmonie interreligieuse et interculturelle à travers la réalisation d’une station touristique et spirituelle au Proche-Orient. La situation ecclésiale et sociale contingente ne permet pas de spécifier davantage l’objectif mais il y a, en cela, probablement un bien. Nous voulons en effet que les étudiants soient créatifs au-delà des clichés symboliques cristallisés. Nous désirons recueillir une moisson artistique qui mette en relation le non-dit de l’inconscient symbolique collectif avec la conscience de futur des jeunes d’aujourd’hui. Les meilleurs projets seront exposés à Damas en septembre et à Deir Mar Moussa en octobre, en lien avec l’événement « Damas 2008 Capitale de la Culture Arabe ».
Nous avancerons avec les structures de base du Visitor Center, créant bientôt une structure de premier accueil et, si nous avons les fonds nécessaires, un camping. L’Etat est propriétaire du terrain, mais, par le biais d’un loyer symbolique ou d’un contrat, quelques structures seront probablement gérées directement par le Monastère. Ensuite, évidemment, nous nous ferons aider par des collaborateurs laïcs locaux.
Un groupe de partenaires prépare un projet d’ateliers artisanaux, aussi bien de transformation de produits agricoles que de productions traditionnelles de tissus, de céramiques et d’objets en cuivre. Ils seront réalisés, inch’Allah, à Deir Mar Moussa et à Deir Mar Elyan.
Nous envisageons la structure finale du Monastère sur trois niveaux.
Le premier est celui de l’accueil de masse lié au tourisme local et international. L’objectif est celui du développement économique et social régional, et aussi celui de l’éducation de base aux valeurs de l’harmonie interreligieuse, de la solidarité sociale et de la sauvegarde environnementale.
Le second niveau est celui de l’initiation à l’expérience spirituelle et esthétique. Le troisième est celui de l’approfondissement de la dimension contemplative et monastique.
Les trois niveaux sont représentés respectivement par le Visitor Center, le monument du monastère, avec sa magnifique église, et les deux résidences monastiques de Deir el-Hayek et de Deir el-Huqab, avec des grottes et des ermitages annexes.
Qaryatayn
Le don généreux d’une famille syrienne nous a permis de continuer la construction du nouveau cloître de Deir Mar Elyan, où se sont déjà installés le Père Jacques et Daniel, ainsi que quelques hôtes de passage. La Communauté leur rend souvent visite durant les jours de repos et de partage fraternel.
Du point de vue agricole, de grands pas en avant ont été faits, aussi bien dans la production de l’huile d’olive que dans d’autres cultures, surtout dans les plantes aromatiques. Un magnifique local pour la vente des produits est presque prêt à l’entrée du monastère et le haut cône de la coupole traditionnelle se dresse au-dessus des arbres.
Etant d’accès facile pour tous, Deir Mar Elyan reçoit un grand nombre de visiteurs du village voisin, en majorité des musulmans, qui viennent en famille pour une visite pieuse ou un goûter. Des groupes paroissiaux et des associations commencent à fréquenter ce lieu, et de plus en plus de personnes en direction et en provenance de Palmyre le choisissent pour faire une halte.
Au revoir
Nous voudrions féliciter et remercier de tout cœur ceux qui ont lu toute la lettre et même ceux qui l’ont lue en diagonale…
Nous espérons vous voir en Syrie, en Italie (à Cori) ou ailleurs. Nous restons dans cette efficace solidarité et empathie de pensée et d’amitié à tous les niveaux que l’Eglise appelle la Communion des Saints. L’union des âmes dans la prière est certainement l’élément le plus universel et le dénominateur commun des religions. Chaque jour, nous en expérimentons l’efficacité et le réconfort.