Semaine de jihad spirituel: Quatrième jour

Rencontre spirituelle de mi-journée

 26 septembre 2011

Musulmans et chrétiens, nous avons lu nos textes sacrés dans l’église du monastère : Evangile (Luc, 6 versets 27 à 38), Coran (sourate de Loqman, versets 9 à 12), Ancien Testament (Genèse 8, fin du voyage de Noé).

Paroles des participants

Un participant demande l’interprétation du « grain de moutarde » dans la lecture du Coran. Toute action de l’homme, qu’elle soit importante ou petite comme un grain de moutarde, sera récompensée ou sanctionnée par Dieu. Nous rappelons une citation d’Abou Bakr as-Siddiq critiquant l’orgueil, qui est inconscience de la situation de l’homme, naturellement humble.

Une des amies ajoute : beaucoup disent que la violence relève de l’instinct humain, d’autres disent que la non-violence est un échec, alors que c’est un moyen important pour obtenir la liberté, les droits, à condition que soit défini un horizon temporel et un but clair.

Un des amis poursuit : la non-violence ne concerne pas seulement le meurtre ou le crime, car je peux aussi être violent dans mes mots, dans mon mal… Quand je regarde l’autre comme un humain, que je respecte ses droits, c’est là la véritable non-violence.

Nous pratiquons la non-violence afin de provoquer une transformation chez l’autre quand il s’avère violent.

Un des participants exprime sa vision du logo de la semaine : les trois couleurs sont dans un cadre rouge, sanglant, comme si pour donner des fruits nous devions consentir à beaucoup de sacrifices. Mais le rouge peut aussi signifier l’action, l’effort. Et le Christ nous a montré la voie de l’action pacifique.

Un des moines : la non-violence est un sujet de recherche intellectuelle, dont nous parlons beaucoup en ce moment. Il faut reconnaître que la violence nous domine tous profondément, que nous l’héritons de nos ancêtres. Quand Jésus dit « ne résistez pas au mauvais », il suggère une subtile transformation chimique dans l’âme… il est difficile pour l’Homme de renoncer à la légitime défense naturelle. C’est une transformation secrète qui me permet d’absorber le mal de celui qui m’attaque.

Le mal contre le mal, ça ne sert à rien.

Un autre participant explique son point de vue sur le logo : si nous considérons que les fruits noirs sont les hommes, dans leur diversité d’appartenances communautaires, et le cadre rouge représente notre commune inclusion dans une patrie unique.

Un autre : le rouge ne représente pas seulement le sang, mais aussi l’amour. Il nous faut vivre cet amour afin que la Syrie croisse et s’ouvre vers l’extérieur du cadre.

Nous espérons être comme des rameaux d’olivier dans la bouche de la colombe de paix. Et que les colombes qui sont présentes à Mar Moussa s’envolent au quatre coins de la Syrie ! Ce que nous faisons, en termes de prière et de jeûne, c’est en soi une branche d’olivier.

Un des moines : Jésus a résisté de manière non-violente à l’oppression, et il était pleinement conscient des dimensions de son message, qui ne consiste pas dans une révolution ou dans le renversement du régime oppressif sous lequel il vivait.

Jésus veut partir de la personne humaine, en tant qu’elle se tient devant Dieu, il fournit ainsi une méthode générale pour toute personne dans la perspective du Royaume des Cieux. Ce qui ne constitue évidemment pas un prétexte pour nous désintéresser du monde et de ses changements.

L’intérêt pour la personne humaine ne signifie pas l’absence d’intérêt pour le régime politique. Mais Jésus part de la transformation de la personne, il considère que si l’on ne part pas de la transformation personnelle, on n’atteint pas non plus en fin de compte le bien de la personne.

Je me sens optimiste, car une graine petite comme un grain de moutarde finit par donner de nombreux fruits. Ce qui veut dire qu’une initiative limitée peut rencontrer l’agrément de Dieu et conduire à un changement. C’est d’un nouveau départ que nous parle l’histoire de Noé, et c’est précisément de cela que nous avons besoin aujourd’hui.

Un des participants s’interroge : est-il possible d’utiliser la non-violence comme un moyen, contre les plus violents que nous et non comme conviction ? Ce moyen peut nous aider à atteindre ce que nous voulons envers les plus forts, tandis qu’en même temps nous nous autorisons le recours à la violence contre les plus faibles.

Un des participants souligne que la non-violence et ses résultats s’inscrivent dans le temps long, tandis que la violence vient justement du désir d’obtenir des résultats le plus rapidement possible… mais ils ne durent pas.

La non-violence, c’est l’acceptation de l’existence du mal, chez moi et chez l’autre, et c’est la compréhension qu’avec la grâce divine, nous pouvons nous développer, progresser… Le premier pas, c’est d’accepter la violence qui existe en nous.